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Les cultures intermédiaires réduisent les fuites de nitrate et améliorent l'écosystème

Par Jean Moullart | Publié le 28 Juin 2012 à 15:09
Les cultures intermédiaires réduisent les fuites de nitrate et améliorent l'écosystème

L’essentiel du nitrate présent dans les eaux de surface et les nappes phréatiques est dû aux excès de fertilisation azotée, ainsi qu’à la production naturelle de nitrate par minéralisation des matières organiques du sol. Entre deux cultures, l’introduction d’une culture intermédiaire piège à nitrate (CIPAN) permet de capter l’azote minéral résiduel du sol avant la période de drainage et ainsi de réduire les fuites d’azote et la concentration nitrique de l’eau de drainage. Dans le cadre de la préparation du 5e programme d’action de réduction des ions nitrate (qui débutera en 2013) déclinant la directive européenne «Nitrate », les ministères chargés de l'Ecologie et de l'Agriculture ont demandé à l’INRA de réaliser une étude qui fasse le point des acquis, des incertitudes et des questions à approfondir sur cette gestion de la période d’interculture. Un collectif pluridisciplinaire d’experts appartenant à différents organismes a été mobilisé. Les résultats, qui montrent l’efficacité des CIPAN dans la plupart des situations, ont été rendus publics le jeudi 28 juin 2012.

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L’objectif principal de l’étude est d’établir un état des connaissances sur la gestion de l’azote en période d’interculture pour les différents systèmes de grande culture français, et sur les conditions d'efficacité des CIPAN pour réduire les fuites de nitrate. L’examen de la bibliographie (près de 800 publications) sur les effets des CIPAN a été complété par un travail de simulation numérique (plus de 1,3 million de situations d’interculture simulées) ; il a également été élargi à d’autres services écosystémiques potentiels rendus par les cultures intermédiaires (CI) : protection des sols contre l'érosion hydrique, séquestration de carbone dans les sols, impact sur les émissions de gaz à effet de serre, contribution au contrôle des adventices, maladies et ravageurs…

  

 

L’effet « piège à nitrate » des couverts intermédiaires

Forme très soluble de l'azote, le nitrate est particulièrement sujet à la lixiviation (improprement nommée "lessivage"), qui est l'entraînement d'une molécule soluble par le drainage (transfert d’eau) au-delà de la zone explorée par les racines. Le drainage, et la lixiviation associée, se produisent notamment à partir de l'automne et durant l’hiver et le printemps suivant quand les précipitations deviennent excédentaires par rapport à la capacité de stockage d'eau du sol.

 

Maîtriser les fuites de nitrate requiert de minimiser le reliquat d'azote minéral du sol en début de drainage. Le premier levier est l’ajustement de la fertilisation azotée pour que le reliquat à la récolte de la culture précédente soit minimal. Ce préalable nécessaire n’est généralement pas suffisant, parce que la culture n'absorbe jamais tout le stock d'azote minéral présent et parce que la minéralisation des matières organiques du sol alimente en continu le pool d’azote minéral du sol.

 

Une solution consiste à faire absorber l'azote minéral par un couvert végétal durant l’automne de façon à l'immobiliser (temporairement) sous forme organique (azote dans les plantes). La fonction d'une CIPAN est donc double : absorber l'azote minéral du sol pour éviter les pertes nitriques par lixiviation, puis restituer à la culture suivante cet azote, libéré par la minéralisation de ses résidus.

 

L'analyse de la bibliographie montre que les CIPAN sont efficaces, dans la plupart des situations expérimentées, pour réduire la lixiviation et la concentration nitrique de l’eau de drainage, avec un taux de réduction généralement supérieur à 50% permettant, le plus souvent, d’obtenir une teneur de l’eau de drainage < 50 mgNO3/l (seuil réglementaire de potabilité). Les effets sont toutefois variables en fonction du contexte pédoclimatique, des conditions climatiques de l’année et du système de culture. Cette variabilité justifie l’intérêt de l'étude par simulation développée par les chercheurs de l’INRA.

 

 

Les simulations précisent l’efficacité « piège à nitrate » des cultures intermédiaires

Les simulations effectuées indiquent que les CIPAN sont efficaces pour réduire la teneur en nitrate de l’eau de drainage en interculture "longue", avant une culture de printemps (excepté après une récolte tardive à l'automne), mais aussi en interculture "courte", avant une culture d'hiver. Les légumineuses peuvent être utiles pour réduire les fuites de nitrate même si leur efficacité est deux fois plus faible que celle des espèces non légumineuses (crucifères et graminées). Les repousses de colza et de blé sont efficaces pour réduire la concentration en nitrate de l’eau de drainage, à condition que le couvert soit dense et homogène spatialement.

 

Cependant, les CIPAN ne sont vraiment efficaces pour restituer une eau de drainage faiblement concentrée en nitrate que si la fertilisation azotée de la culture précédente, bien ajustée, n'a laissé qu'un reliquat à la récolte faible ou modéré.

 

Les CIPAN réduisent le drainage mais n’ont pas d’impact sur l’alimentation hydrique de la culture suivante si la date de leur destruction est adaptée (pas trop tardive, ni proche du semis du suivant).

 

Enfin, l’impact des CIPAN de crucifères et de graminées sur le rendement de la culture suivante est légèrement positif ou nul, sauf parfois en situation d’interculture courte où il peut être négatif. Des conditions plus spécifiques (sols argileux, climat méditerranéen) nécessitent des adaptations particulières de la conduite des CIPAN pour s’assurer de leur efficacité.

 

 

Les autres effets des CIPAN

Par leur biomasse aérienne et leurs racines, qui protègent le sol de l'impact des gouttes de pluie et ralentissent le ruissellement, les cultures intermédiaires peuvent réduire l’érosion hydrique. Par leur apport de matière organique au sol, elles permettent aussi une amélioration de l’état structural et des propriétés physiques du sol. Elles permettent de séquestrer du carbone et de l'azote organique dans les sols et ont donc un effet positif sur le bilan des gaz à effet de serre.

 

La CI est susceptible, par effet de compétition, de réduire la levée des adventices, leur développement et leur montée à graines. En outre, plusieurs familles botaniques émettent des composés chimiques capables d’inhiber le développement d'autres organismes. Ces propriétés sont bien établies pour des crucifères, et déjà utilisées à l’interculture contre des maladies ou des ravageurs se développant dans les sols, notamment des nématodes ravageurs de la betterave sucrière ou de cultures maraîchères. Inversement, des ravageurs peuvent être favorisés par certaines cultures intermédiaires et leurs résidus : c'est le cas des limaces ou des larves phytophages de certains insectes.

 

 

Des besoins de recherche - développement

Si l'étude a confirmé l'efficacité des CIPAN et ses déterminants majeurs, elle a aussi mis en évidence un besoin d’approfondissement de certaines connaissances et la nécessité de développer des recherches coordonnées, notamment sur les propriétés des espèces utilisables en CIPAN, leurs impacts sur les bioagresseurs des cultures principales, l'optimisation de leurs itinéraires techniques, l'impact de leur généralisation sur les ressources en eau, les effets du changement climatique sur leur efficacité, l’analyse coût-bénéfice des cultures intermédiaires en considérant l’ensemble de leurs fonctions et l’étude des politiques publiques les plus efficaces pour leur mise en œuvre.




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