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Semis tardifs de céréales: les précautions à prendre pour limiter les risques encourus

Par Jean Moullart | Publié le 26 Novembre 2013 à 14:39
Semis tardifs de céréales: les précautions à prendre pour limiter les risques encourus

Pour ARVALIS-Institut du Végétal, les semis tardifs de céréales à paille (blé tendre et blé dur) sont possibles mais ils s’exposent à des risques climatiques et des pertes de potentiel de rendement. Théoriquement, le potentiel est amputé de 0,1 à 0,6 q/ha par jour de retard. Mais attention, cette évaluation ne traduit cependant pas la forte variabilité de réponse, notamment en lien avec les conditions de fin de cycle. De toute façon, le semis doit être réalisé dans les meilleurs conditions structurales possibles du sol sous peine de limiter la capacité d'enracinement de la céréale. Et ARVALIS rappelle qu'il ne faut pas hésiter à augmenter les densités de semis.

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Quels sont les risques climatiques encourus ?

Indépendamment des conditions d’implantation qui peuvent être très moyennes à cause des cumuls d’eau récents, les semis tardifs induisent un certain nombre de risques climatiques pour les cultures:

- Une levée lente : la température est le principal moteur de la germination et de la levée ; on considère qu’il faut en moyenne 150 °Cj pour faire lever une céréale à paille (éventuellement plus pour des semis profonds ou des surfaces très motteuses). Cette durée est inférieure à 10 jours début octobre, mais peut facilement dépasser un mois pendant les phases les plus froides de l’hiver ;

- Excès d’eau pendant la germination : la germination est très sensible à l’ennoiement intégral, ou même à l’hydromorphie très marquée. Un semis tardif expose donc évidemment la culture à ce genre d’accident pendant une durée plus longue ;

- Froid avant le stade tallage : la résistance au froid des cultures augmente progressivement au fur et à mesure de la vernalisation. Des plantules au stade coléoptile ou 1 feuille n’ont donc pas eu le temps de s’endurcir, et sont fragiles vis-à-vis d’une chute brutale des températures. Les semis tardifs s’exposent donc à des pertes de pied par gel des plantules. Dans le cas des sols soufflants (sols de craie par exemple), le déchaussement peut également être très préjudiciable ; il intervient souvent avant le stade tallage, lorsque le système racinaire est encore peu développé ;

- Forte réduction du tallage : si l’hiver est froid, la culture aura peu d’opportunités de taller avant le début de la montaison. Dans ces cas, le tallage se prolonge souvent après Epi 1 cm et le taux de montée des tiges est correct, mais le peuplement épi peut quand même être affecté ;

- Décalage de cycle : le retard au semis ne sera en aucun cas comblé à la montaison et au remplissage (à variété égale) ; tout au plus, il sera réduit à une semaine ou 10 jours à épiaison, mais ceci peut être suffisant pour conduire à de fortes pénalités si le printemps est sec ou chaud. De plus, chaque phase d’élaboration du rendement sera raccourcie, limitant la mise en place de chaque composante.

 

A l’inverse, deux types d’accidents climatiques deviennent très improbables pour des semis tardifs :

- Gel en hiver, comme le scénario de janvier-février 2012 : les cultures semées tardivement vont progressivement vernaliser pendant l’hiver, avec un niveau de résistance au froid croissant jusqu'en février ;

- Gel au début de la montaison : le décalage de cycle à Epi 1 cm sera fort, sans doute équivalent à 2 semaines. Ce retard conduira le début de la montaison vers des périodes normalement plus douces.

 

Un potentiel amputé de 0,1 à 0,6 q/ha par jour de retard

En moyenne, on considère que le potentiel de rendement est abaissé de 0,12 à 0,6 q/ha/j de retard par rapport à la plage idéale (Carte 1). Selon les zones, le retard est désormais de 2 à 4-5 semaines par rapport à la période recommandée de semis. Cela implique donc un potentiel en retrait de 5 à 10 q/ha. Attention : cette évaluation ne traduit cependant pas la forte variabilité de réponse, notamment en lien avec les conditions de fin de cycle ; elle n’intègre pas non plus la modification de précocité variétale, qui permet de réduire cette pénalité.

 

Orge d’hiver : des semis tardifs à proscrire

Pour l’orge d’hiver, espèce sensible au froid, une chute des températures avant le début du tallage constitue le principal risque. Risque qui devient fortement probable sur les 3/4 du territoire dès le début du mois de novembre. Un semis actuel ferait prendre le risque de fortes pertes de pieds pendant l’hiver. Les producteurs sont généralement habitués à cesser leurs semis d’orges d’hiver lorsque novembre approche (selon les régions), et préfèrent s’orienter vers d’autres cultures. D’après les retours du terrain, les situations d’orges d’hiver non semées restent peu nombreuses à l’échelle nationale (signalé en Sud Rhône-Alpes, Berry, Poitou-Charentes).

 

Blé tendre et blé dur : la résistance au froid à prendre en compte

Pour ces deux espèces, les semis sont évidemment encore possibles, moyennant précautions. La première sera la qualité d’implantation : il est préférable de retarder les semis que de prendre le risque d’un enracinement sacrifié.
En blé tendre, toutes les options variétales sont en théorie possibles. En effet, dans chaque région, les préconisations variétales avancées par les équipes ARVALIS et les dates de semis associées sont des combinaisons qui donnent en général les meilleurs rendements. Cependant, pour un semis de fin novembre, même des variétés de type « très hiver » auront la capacité de vernaliser au cours des mois à venir (au moins pour la moitié ou les 2/3 nord du pays) : elles produiront donc sans problème des épis. Par contre, le retard prévisible des stades peut engendrer une pénalité sensible du rendement (pénalité d’autant plus sensible que la fin du printemps est chaude et sèche). Le semis de variétés tardives à partir de maintenant doit donc être considéré comme une solution de rattrapage (stock de semences à finir), et non comme une pratique recommandable à grande échelle.
Ce n’est qu’à partir de mi-janvier qu’il devient indispensable de prendre en compte la note de vernalisation et le climat local pour décider de l’arrêt des semis. En blé dur, les besoins de vernalisation sont minimes, et le décalage du cycle sera en grande partie gommé dès la montaison. On peut donc semer n’importe quelle variété, même si la période idéale est dépassée.
Pour les deux espèces : blé tendre et blé dur, les semis tardifs sont exposés à l’arrivée du froid à des stades précoces, lorsque les plantules sont encore très sensibles. Le choix d’une variété plus résistance au gel est donc une parade judicieuse.

 

Augmenter les densités de semis

Lorsqu’on se penche sur les pratiques, ARVALIS voit une tendance à ne pas assez abaisser la densité de grains/m² pour les semis précoces, et à l’inverse à ne pas assez l’augmenter pour les semis tardifs. La hausse de la densité est nécessaire pour 3 raisons :

  • Des qualités d’implantation souvent moins bonnes en semis tardif, ce qui abaisse le taux de levée ;

  • Des accidents climatiques plus dommageables sur des cultures jeunes, entrainant des disparitions de plantes pendant l’hiver (gel, excès d’eau) ;

  • Une période de tallage fortement raccourcie, qui mène souvent à un manque de talles à Epi 1cm.

Les préconisations régionales d’ARVALIS donnent, pour différentes dates de semis, une densité de grains à semer, en lien avec le type de sol et le climat local médian.




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