La verse des céréales, qu’elle soit d’origine physiologique ou pathologique, peut engendrer des pénalités significatives (pertes de rendement, difficultés de récolte, dégradation de la qualité à la récolte : impuretés, baisse du poids spécifique, risque de germination sur pied). Les conditions météorologiques de l’année sont particulièrement propices à l’apparition de ce phénomène.
La verse met en jeu un équilibre mécanique assez simple entre l’effet de levier exercé par l’épi au bout de la tige et la résistance du bas de la tige ou du système racinaire. Si l’épi est lourd, ou perché sur une longue tige, ou sujet à un effort latéral fort (du vent en particulier), la capacité du bas de la tige ou des racines à maintenir la plante verticale risque de ne pas être suffisante. La solidité de la tige se conditionne assez tôt (début de montaison), alors que le déclenchement de la verse (c’est-à-dire l’application d’un effort suffisant sur la tige) se fait tardivement, pendant le remplissage. La stratégie de lutte contre ce phénomène ne peut donc se concentrer que sur la rigidification de la tige au début du printemps, alors que le déclenchement éventuel de la verse ne peut être contrôlé par l’exploitant.
Cette année, les facteurs de prédisposition à la verse étaient en tendance plutôt défavorables : tallage abondant, épi 1cm précoce (pour les zones sud), conditions fraiches (favorables à l’allongement des entre-nœuds), bonne absorption de l’azote. On se retrouve donc majoritairement maintenant avec des couverts denses (fortes densités d’épis), dont la base des tiges n’est pas forcément rigidifiée. De plus, les maladies de la base de la tige (piétin verse) ou des racines (piétin échaudage) restent régulièrement observées dans les parcelles. Le niveau de sensibilité globale à la verse est donc, en l’absence de traitement adapté, plutôt élevé.
A cela s’ajoutent les conditions exceptionnelles de ces derniers jours : beaucoup d’eau, du vent, sur des cultures qui épient (blés nord France) ou qui remplissent leurs grains (orges d’hiver ou blés au sud de la Loire). Les efforts exercés sur les tiges par des épis de plus en plus lourds (par le remplissage des grains ou par le chargement des épis et barbes en eau), associés à des pluies et des rafales, risquent de faire ployer les tiges les plus fragiles.
Si les conséquences générales de la verse sur les conditions de récolte sont bien connues, il est beaucoup plus difficile d’évaluer précisément les pénalités à craindre en termes de rendement. En effet, lorsque la culture verse, l’interception de la lumière est fortement perturbée (il n’y a plus de pénétration de la lumière jusqu’aux étages inférieurs et aux tiges, seule la partie supérieure du matelas reçoit de la lumière), et dans certains cas de pliure des tiges, la circulation de la sève brute peut être fortement altérée. Ainsi, plus la verse est précoce et intense (parcelle « roulée »), plus la pénalité sera forte ; elle s’exprimera presque exclusivement par une perte de poids de mille grains (PMG).
Un ensemble d’essais comprenant des modalités versées et non versées a permis d’estimer cette perte de PMG en fonction des deux variables : date et intensité de la verse. En termes de rendement, cela correspond à environ 40 % de pertes dans le cas d’une verse très précoce (dès floraison) et très marquée (tiges complètement couchées). A l’inverse, si la verse intervient très tard, à partir de maturité physiologique, le rendement ne sera quasiment pas touché (sous réserve de pouvoir tout récolter) et la pénalisation ne concernera « que » les conditions de récolte et éventuellement la dégradation de critères technologiques (Poids Spécifique, Temps de Chute de Hagberg, germination sur pied, humidité et propreté à la récolte).
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